Extraits de la Correspondance générale, Napoléon Ier, tome VII, Fayard 2010 (Bibliothèque Municipale de Lyon, Part-Dieu, Silo moderne, cote K164247-T 07)
14406 - AU MARÉCHAL SOULT, COMMANDANT DU 4e CORPS DE LA GRANDE ARMÉE
Osterode, 25 février 1807, midi et demi
Mon cousin, le maréchal Bernadotte1 mande qu'hier 24 les Prussiens avaient trois bataillons d'infanterie à Braunsberg et paraissaient avoir été dans l'intention de marcher sur Elbing avec 4,000 hommes. Le 23, ils se sont avancés sur Guttstadt avec quelques bataillons; le maréchal Ney2 les a culbutés sur Steilsberg, et, le 24, il avait le projet de les pousser sur Heilsberg. Je n'ai point de nouvelles de ce qu'il a appris là. Le 23 au soir, à cinq heures, vous avez rendu compte que vous n'aviez pas jugé a propos de prendre Wormditt. Je n'ai point de nouvelles de vous d'hier.
Le 5e corps3a culbuté entièrement tout ce qu'il avait devant lui. Il y a eu des événements assez avantageux de ce côté. Il faut garder en force le pont d'Alken, qui protège le flanc du maréchal Bernadotte. Faites-moi connaître, par le retour de l'officier d'ordonnance que je vous expédiece que vous savez et conjecturez, et votre position exacte.
Si vous aviez déjà mandé ce matin au major général4 tous les renseignements que vous avez, et que vous n'ayez rien à y ajouter, vous pouvez expédier l'officier d'ordonnance demain ou cette nuit, lorsque vous aurez quelques nouvelles.5
Napoléon
1 1er corps d'armée.
2 6e corps d'armée.
3 Commandé par Savary.
4 Berthier.
5 Correspondance de Napoléon Ier publiée par ordre de l'empereur Napoléon III, n° 11877, d'après le dépôt de la Guerre (minute, Archives nationales, AF IV 872, février 1807, n° 142).
14408 - AU MARÉCHAL AMEY, GOUVERNEUR D'ELBING1
Osterode, 26 février 1807
Secondez le commissaire ordonnateur Mathieu-Faviers dans toutes ses mesures.
Tenez des postes de cavalerie sur les routes de Braunsberg et Dantzig afin de n'être pas surpris.
Envoyez-moi le meilleur plan de la ville et des environs que vous pourrez vous procurer. Faites-moi connaître la nature du chemin jusqu'à Dantzig, et s'il y a des ennemis dans la Nogat; l'espèce de bâtiments qui naviguent dans le Haff2.
Tâchez d'avoir des nouvelles du maréchal Lefebvre, qui ne doit pas tarder à se porter devant Dantzig. Le général Boivin3, avec le 2e léger et deux pièces de canon, est à Marienbourg; vous pourrez vous en servir, s'il arrivait que vous ayez besoin d'infanterie, contre les détachements de cavalerie ennemie. Mettez-vous en correspondance avec lui. Envoyez au major général4 un rapport tous les jours.5
1 Il vient d'être nommé à ce poste.
2 La lagune Frisch Haff qui débouche sur la Baltique.
3 Au 10e corps sous Lefebvre depuis le 25 janvier 1807.
4 Berthier.
5 Minute, Archives nationales, AF IV 872, février 1807, n° 168. Note sur la minute : "Par un officier polonais."
14410 - À CAMBACÉRÈS, ARCHICHANCELIER DE L'EMPIRE
Osterode, 26 février 1807
Je reçois vos lettres du 12 et du 13 février. Il n'y a rien de nouveau. Il gèle et il dégèle. Je vois qu'il fait ici le même temps qu'à Paris. Nous voilà en mars et il n'a pas encore fait une véritable journée d'hiver.1
1 Minute, Archives nationales, AF IV 872, février 1807, n° 168.
14410 - AU GÉNÉRAL DUROC, GRAND MARÉCHAL DU PALAIS
Osterode, 26 février 1807
Je reçois votre lettre du 23. Il paraîtrait que l'ennemi s'avance, et que l'engagement ait lieu dans deux ou trois jours. Ce matin, à Paterswald, à 3 lieues en avant de Guttstadt, on a pris un général-major, baron de Korff, et 3 bataillons russes1.
Ma plus grande inquiètude est pour les substistances. J'imagine que l'intendant général2 est parti pour Thorn; cela est très important, pour qu'il prépare les moyens de subsistances et qu'il évacue tous les blessés sur Posen et au delà de la Vistule; qu'il nous envoie des chirurgiens puisqu'il est possible qu'il y ait encore des blessés. Il faudra prendre les communications par la rive gauche de la Vistule comme la plus certaine.
Masséna doit être arrivé. Je désire que Rapp et Le Marois se dirigent sur Thorn; le premier, pour prendre le commandement de la ville et avoir la haute main sur l'administration civile et militaire. Portez-vous-y aussi si vous êtes parfaitement guéri3. Faites réparer le pont; évacuez les blessés et envoyez des subsistances à l'armée. Je ne suppose pas que vous y soyez avant six jours.
Je crois avoir déjà ordonné que tous les dépôts de la rive droite fussent sur la rive gauche. Pressez aussi Savary de venir me joindre. Prévenez Masséna de ce que je vous dis là, pour qu'il se rende à son corps d'armée4 et qu'il manoeuvre selon les circonstances et ses instructions générales; qu'il empêche surtout les divisions d'Essen, de Müller5, et la troisième, qui est actuellement du côté de Johannisbourg, de se réunir à l'armée ennemie. Écrivez au prince Jérôme qu'il active l'arrivée des Bavarois.
Comme la communication directe peut être fort utile pour communiquer rapidement avec Masséna, il faut conserver la ligne de la Wkra, en se servant de quelques Polonais. Parlez-en dans ce sens avec ce maréchal. Je reçois le premier courrier par la commuication directe. Par cette route je reçois votre lettre du 24. En cas que, pour objets importants, il fallût se servir de la rive gauche, on peut se servir de la nouvelle route pour des objets moins importants, et même en se servant de Polonais affidés; ils sont toujours assez adroits pour passer. Je désire que tous les jours on m'expédie un courrier par cette route; en arrivant en trente-six ou quarante heures, c'est une grande satisfaction. On peut aussi, pour des nouvelles importantes qu'on aurait à faire passer, faire des cachettes, telles que la semelle des souliers ou autres, afin que, le courrier arrêté, la dépêche ne fût pas trouvée.6
1 Voir ci-dessus, n° 14409.
2 Daru.
3 Grièvement blessé par suite d'une chûte de sa voiture (17 décembre 1806).
4 Le 5e corps. Voir ci-dessus, nos 14398 et 14404.
5 Comprendre : Meller-Zakomelsky.
6 Minute, Archives nationales, AF IV 872, février 1807, n° 161.